STREET-ART

L’artiste graffeur Jasm One pendant la réalisation de sa fresque sur la façade du Foyer Soeur Louise Bron, à Fully, Valais, Suisse

Le Valais inaugure un musée à ciel ouvert à la rencontre du street art. Une approche contemporaine du patrimoine culturel à découvrir sur les murs du canton.

On connaît le street art des métropoles, qui s’empare des espaces de grande visibilité, de gigantesques fresques murales souvent colorées et parfois très tape-à-l’oeil. Issam Rezgui, alias Jasm One, artiste graffeur à l’origine du projet Art Valais et président de l’association du même nom, travaille actuellement à sa dernière oeuvre, une fresque destinée à capter le regard des passants à la sortie de la gare de Zermatt. L’artiste y interprète l’ascension du Cervin par Lucy Walker, la première femme à réaliser cet exploit il y a cent cinquante ans. Cette oeuvre anniversaire est également la première de la collection 2021 d’Art Valais, qui viendra enrichir le musée à ciel ouvert du canton.

Une collection en devenir, née de l’initiative d’Issam Rezgui qui prévoit la création de fresques en plein air dans plus de 50 communes du Valais, d’Obergoms à Saint-Gingolph. Huit oeuvres ont déjà été produites l’année dernière par des artistes suisses et internationaux dans le cadre de cet ambitieux projet culturel. Du printemps à l’automne, dix nouvelles fresques devraient prendre forme. Dès cet été, l’application Street Art Valais permettra de suivre sur son smartphone ce parcours culturel autour du thème de l’eau. Des informations sur les oeuvres, sur les artistes et sur les lieux d’exposition y seront disponibles. En période de pandémie, la création d’un musée d’art urbain à ciel ouvert accessible gratuitement à tout public et à tout moment est plutôt une bonne idée. En plus de contribuer de manière significative à la promotion de la culture régionale, Art Valais et ses oeuvres engagées sont désormais inclus au programme de développement durable Agenda 2030. « Nos fresques urbaines sont réalisées en tenant compte de l’ADN local, des traditions et de l’environnement. Les œuvres doivent avoir un sens dans le lieu où elles se trouvent », explique Issam Rezgui. « Il ne faut pas avoir honte de notre folklore et toujours chercher à réinterpréter ce patrimoine de façon novatrice », ajoute-t-il.

« Now Future », de Jasm One, orne la façade de l’Association sierroise de loisirs et culture, à proximité de la gare de Sierre, Valais, Suisse

L’artiste, qui a grandi à Sion, est l’auteur d’une première fresque légale en 2002, dans le passage sous-terrain du pont du Rhône. En 2008, il expose sur le mur de la piscine en plein air et obtient la même année l’autorisation de taguer 13 murs dans la ville de Sion. Il fonde alors un réseau de graffeurs, Collectif 21, et invite une cinquantaine d’artistes en Valais, pour sprayer avec lui les quelque 800 m2 mis à sa disposition. « Taguer de manière légale change tout. Les outils et la technique sont les mêmes, mais l’approche est complètement différente. Je fais des recherches sur les particularités et l’histoire du lieu et travaille avec des critères esthétiques bien plus élevés », raconte l’artiste.

L’oeuvre de 1001, un artiste vivant à Hambourg, se découvre près du lac de Chermignon, dans la région de Crans-Montana. Elle met en scène une rivière, le mouvement et les différents niveaux et couleurs de l’eau, Valais, Suisse

Les oeuvres du musée en plein air ne naissent pas par hasard. Les artistes sont encadrés par Issam Rezgui, le curateur de l’exposition, et choisis par un jury constitué de trois experts nationaux et internationaux. Le choix du lieu, du sujet et de l’artiste qui réalisera la fresque se fait selon une procédure très claire. Il s’agit d’abord de saisir l’identité d’une commune pour en extraire une caractéristique particulière. Le mur à peindre doit être validé en même temps que le choix d’une ligne graphique parmi les trois à disposition : une oeuvre figurative en noir et blanc, une fresque graphique et abstraite ou une illustration en couleur. L’artiste choisi est invité à séjourner en Valais afin qu’il puisse s’imprégner de l’identité locale. Et c’est ainsi qu’à travers un univers artistique individuel naît une nouvelle interprétation du patrimoine culture existant. Issam Rezgui prend l’exemple de Martigny pour expliquer comment il se met à la recherche d’indices qui lui permettent de comprendre les spécificités d’un lieu. Ici, il se demande d’abord comment l’art du graffiti peut coexister avec la Fondation Pierre Gianadda. Ses recherches le conduisent à la Médiathèque de Martigny, où les archives visuelles du canton sont conservées, et déjà il a sa réponse. Les fresques d’art urbain de Martigny seront figuratives, en noir et blanc ou bichromatiques, et représenteront des personnes et leur rapport à l’eau, établissant ainsi un pont avec les témoins picturaux du passé de la Médiathèque.

L’artiste graffeur Jasm One pendant la réalisation de sa fresque sur la façade du Foyer Soeur Louise Bron, à Fully, Valais, Suisse

Peut-on imaginer un graffiti couvrant le mur d’un barrage ? Issam Rezgui n’en est pas convaincu : « Une oeuvre permanente serait inappropriée. On pourrait cependant imaginer quelque chose de plus subtil, une fresque qui mettrait en scène le mur et la nature. » Le centre historique protégé du village d’Ernen représentait également un défi pour les artistes graffeurs. Ils ont trouvé une solution à l’aide d’une projection vidéo.

Texte: Manuela Lavanchy

Publication: Juillet 2021

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